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  • Clémentine Fitaire

Photos: 

  • Nicolas Righetti | lundi 13

«Tout le monde peut être concerné par la dénutrition»

Fil conducteur entre les différentes spécialités médicales de l’hôpital, la prise en charge nutritionnelle concerne beaucoup de patients et patientes aux profils divers. Une pluralité qui passionne la Pre Laurence Genton-Graf, à la tête de l’Unité de nutrition.

Pulsations Quelles sont les fonctions principales de l’Unité de nutrition ?
Pre Laurence Genton-Graf C’est une unité très transversale puisque nous travaillons avec quasiment tous les types de malades. Nous mettons en place des évaluations et des traitements nutritionnels avec les diététiciens, nous apportons notre expertise lors de perte de poids involontaire importante, nous prenons en charge des patients avec une stomie (orifice dans l’abdomen), car elle peut induire une perte calorique et hydrique… nos missions sont très variées. Elles ne se limitent pas seulement à la prescription nutritionnelle, mais concernent le métabolisme en général. C’est complexe, mais c’est aussi ce qui fait la beauté de cette discipline. Nous collaborons étroitement avec les équipes de nombreux services, en partageant un but commun, celui d’améliorer le devenir du patient. C’est une vraie chance de bénéficier de cette structure pluridisciplinaire, l’une des rares en Suisse.

Quelle est la particularité de la nutrition clinique par rapport à d’autres spécialités ?
Outre sa transversalité, le fait qu’elle soit encore parfois négligée. Jusqu’à récemment, il n’existait pas d’enseignement en nutrition clinique. La plupart des médecins n’étant pas formés dans ce domaine, certains peuvent se retrouver démunis dans leur pratique. Mais le Dr Tinh Hai Collet – médecin adjoint de l’unité – et moi-même avons participé à la création d’un cursus approfondi en nutrition clinique, validé par l’Institut suisse pour la formation (IFSM) et effectif depuis juillet 2021*, ce qui pourrait en partie remédier à cette situation.

La prise en charge des patients et des patientes dénutries est l’une de vos missions. Est-ce un phénomène fréquent ?
Oui, en effet. Entre 20 et 30 % des personnes sont dénutries à leur admission à l’hôpital. Pour établir un état de dénutrition, nous nous basons sur différents critères métaboliques (indice de masse corporelle, perte de poids, masse musculaire) et étiologiques (maladie aiguë, inflammation, apport alimentaire bas). La dénutrition est fréquemment accompagnée de déficits, isolés ou multiples, en micronutriments (vitamines, minéraux, etc.).

Tout le monde peut donc être concerné ?
Oui, la dénutrition touche aussi bien les personnes maigres que celles de poids normal ou en surcharge pondérale. Une personne en surpoids qui a maigri, par exemple, peut tout à fait être dénutrie si sa consommation alimentaire est insuffisante pour couvrir les besoins de l’organisme. Notre but est d’apporter à tous ces patients un support nutritionnel selon la gravité de la situation, allant de simples conseils à des suppléments oraux, voire à une nutrition artificielle, afin d’améliorer la prise en charge.

Quels sont les risques de la dénutrition ?
Les conséquences sont nombreuses et parfois graves. La dénutrition augmente notamment le risque de perte de mobilité, d’infections et d’escarres, ainsi que la durée du séjour hospitalier et altère la qualité de vie. Dans certains cas, elle entraîne également une diminution de l’efficacité et de la tolérance aux traitements.

Il semble que le Covid-19 pourrait entraîner une dénutrition importante. L’avez-vous constaté ?
Des études indiquent en effet un lien avec la péjoration de l’état nutritionnel. C’est valable pour le Covid-19 comme pour toute maladie aiguë nécessitant une hospitalisation. On a aussi montré, en collaboration avec le Département de réhabilitation et gériatrie, que les patients atteints de Covid-19 qui étaient dénutris mettaient plus de temps à récupérer. La dénutrition s’explique notamment par la présence de fièvre et de difficultés respiratoires qui engendrent une forte dépense énergétique, à laquelle s’ajoute un apport alimentaire moindre lors des périodes symptomatiques.

*Plus d’infos sur le site de la Société suisse de nutrition clinique : www.ssnc.ch
 

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