Pulsations Réseau de santé, article pour les prestataires de soins

Texte: 

  • Clémentine Fitaire

Photos: 

  • Bulat Silvia

Détecter les signes précoces de psychose

Depuis avril 2025, le Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (SPEA) propose une plateforme d’évaluation du risque de psychose pour les jeunes de 12 à 18 ans. Développée dans le cadre du programme intercantonal PsyYoung, elle vise à identifier plus tôt les situations à risque de transition psychotique.

« Plus le début de la prise en charge pendant la phase d’entrée qui précède la psychose est retardé, moins le pronostic est favorable », rappelle le Dr Nicolas Meyer, chef de clinique au Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent et responsable de cette plateforme. Les troubles psychotiques, s’ils ne sont pas détectés pendant la phase prodromique, peuvent avoir un fort impact fonctionnel et sociétal. Pour être en mesure d’intervenir avant un premier épisode, une évaluation spécialisée du risque a été conçue. Inspirée du programme JADE (Jeunes adultes avec troubles psychiques débutants), déjà en place à l’Unité de psychiatrie du jeune adulte, elle s’inscrit dans la dynamique du projet PsyYoung, qui vise à harmoniser les pratiques de détection précoce en Suisse.

Cette plateforme à destination des adolescents et adolescentes constitue donc l’aboutissement du développement à Genève d’un volet spécifiquement pédopsychiatrique pour ce programme. « C’est un domaine qui mérite véritablement d’être investi au niveau de la santé mentale publique », souligne le Dr Logos Curtis, responsable de l’Unité de psychiatrie du jeune adulte (UPJA) et coordinateur genevois de PsyYoung.

Réduire les délais

La psychose regroupe des troubles psychiatriques sévères, comme la schizophrénie, marqués par une rupture avec la réalité (hallucinations, idées délirantes, désorganisation de la pensée). Avant l’apparition formelle de la maladie, certains jeunes peuvent présenter des signes discrets, atténués ou transitoires tels que des idées inhabituelles, une méfiance croissante, un retrait social… Une évaluation ciblée, permet de concentrer la surveillance sur les profils les plus à risque et d’intervenir rapidement si une psychose se déclare — ce qui concerne environ un quart de cette population (soit entre 1 et 5% de la population générale). « Parfois, quelques semaines de retard dans la prise en charge peuvent faire une réelle différence sur le risque de rechute, d’hospitalisation ou de suicide. Ce délai est un facteur pronostique sur lequel, nous, soignants et soignantes, pouvons agir », souligne le Dr Logos Curtis.

Un dispositif structuré et adapté

L’évaluation repose sur un protocole en trois étapes. Le ou la professionnelle (pédiatre, psychiatre, psychologue ou médecin généraliste) qui adresse un cas commence par remplir avec son ou sa patiente un questionnaire de 16 items. En cas de risque identifié, un premier entretien clinique est fixé pour explorer les signes émergents. « Le point de bascule vers une psychose avérée, c’est lorsque l’esprit critique n’est plus préservé avec une perception erronée de la réalité », précise Elodie Sprüngli-Toffel, psychologue pour la plateforme PsyYoung, responsable de l’évaluation.

Un deuxième rendez-vous, appuyé par l’outil standardisé SIPS (Structured Interview for Psychosis-risk Syndromes ou Entretien structuré pour les syndromes à risque de psychose), complète l’analyse. Lors d’une troisième rencontre en présence du ou de la patiente, de ses proches et du ou de la professionnelle référente, les résultats sont restitués et un plan de soins est établi pour diminuer les atteintes des symptômes sur la vie quotidienne. Une réévaluation à six mois est proposée, avec possibilité d’appui consultatif ponctuel pour le réseau de soins.

Au-delà de la détection du risque de psychose, cette évaluation a pour avantage d’écarter les traitements inadaptés. « Le risque est de surmédiquer les jeunes qui présentent des signes flous. Or les antipsychotiques, aux effets secondaires parfois lourds, ne sont pertinents qu’en cas de psychose avérée ou de fonctionnement fortement affecté par les symptômes psychotiques », insiste le Dr Nicolas Meyer.

Demander une évaluation médico-psychologique du risque d’entrée dans la psychose (Plateforme PsyYoung Ado)
 
 

25%

Le taux des rentes AI octroyées aux jeunes adultes de 25 à 29 ans liées à un trouble psychotique.

(Source : J Clin Med. 2023 Jul 12;12(14):4642. doi: 10.3390/jcm12144642)

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