Grâce à la danse, la musique ou les arts plastiques, des patients hospitalisés ou en suivi ambulatoire parviennent à se décentrer de leur maladie et à prendre du recul.
Lors de moments de rupture de vie (accident, maladie, deuil, divorce, entre autres), mais aussi en cas de maladies chroniques ou psychiatriques, il est souvent difficile d’exprimer ses souffrances et de s’en distancier. L’art-thérapie est une pratique de soins qui peut apporter une aide précieuse. Elle est dispensée dans différents départements des HUG depuis 1999.
Via un support, qui peut être la musique, la danse ou les arts plastiques, le thérapeute parvient à mettre en avant les ressources du patient. «L’art-thérapie met en évidence ce qui est sain chez la personne afin de la décentrer de sa maladie», explique Anne-Hélène Skoulikas, art-thérapeute au Département de réadaptation et gériatrie sur le site de Loëx.
Porter son attention ailleurs
Créer, retrouver son élan vital, réapprendre l’autonomie et porter son attention sur quelque chose de concret sont autant de possibilités offertes par le dessin, la musique ou la danse. «Nous travaillons à redonner de la motivation aux personnes hospitalisées et à leur offrir l’occasion de s’exprimer autrement que par les mots», continue la spécialiste. Un avis partagé par Laurence Angst, art-thérapeute au Service de psychiatrie gériatrique et au Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent : «Dans certaines situations très douloureuses, le patient n’a pas de mots pour exprimer son mal-être. La création nourrit alors une autre parole, plus spontanée, plus connectée à l’instant présent.»
Anne-Hélène Skoulikas se souvient de cette quinquagénaire en fin de vie qui refusait tout traitement médical. «Ce qui m’a marquée, c’est son engagement en faveur de la vie, la force de ses convictions, son souhait de transmission qui, malgré son déni de la maladie, s’est exprimé dans ses images. La patiente a pu puiser sa force dans la création artistique, en y amenant une certaine beauté, contrecarrant la difficulté de son hospitalisation.»
En laissant parler son imaginaire, on parvient à prendre du recul et à lâcher prise. «Les dessins réalisés en art-thérapie sont souvent très abstraits et je ne cherche pas à les interpréter, précise Laurence Angst. L’important est d’instaurer le dialogue et de donner au patient l’occasion de restaurer le lien à soi et à autrui.»
A chaque art ses vertus
La danse et le mouvement aident le malade à se reconnecter avec son corps et à réapprivoiser son image. La musique, elle, favorise un espace d’expression des émotions et des affects par l’intermédiaire du monde sonore. Quant aux arts plastiques, ils permettent d’exprimer différemment ses émotions afin de mieux les comprendre et d’enclencher un processus thérapeutique. Laurence Angst et Anne-Hélène Skoulikas précisent d’ailleurs que leur travail thérapeutique ne se veut pas un cours d’arts plastiques. Pas besoin d’être doué pour que les séances soient efficaces. C’est le processus de création et de transformation qui est important, non pas l’image finale.
Marianne* a assisté à une des séances d’art-thérapie de sa sœur, atteinte d’hémiplégie (paralysie partielle). «Je pensais que ce type d’approche servait uniquement à distraire les malades, confie-t-elle. J’ai constaté qu’il y avait un vrai projet thérapeutique de réhabilitation des fonctions de la main par le dessin. L’atelier est un lieu très agréable qui a permis à ma sœur d’oublier qu’elle était à l’hôpital.» Un avis partagé par Jocelyne*, hospitalisée à Loëx suite à un AVC : «Au début, j’étais très déprimée. Les séances avec ma thérapeute m’ont redonné goût à la vie. Faire de l’art-thérapie, c’est entreprendre un véritable voyage dans la couleur, c’est passionnant. Dessiner m’a redonné la force de jouer du piano.»
* Prénom d’emprunt
Détails de créations de patients (archives de Loëx).
Illustrations de quelques thématiques récurrentes, comme l’être humain, l’habitation et la construction, la nature, les paysages et les voyages au long cours.
Texte:
- Esther Rich
Photos:
- Nicolas Righetti | lundi13