Largement méconnus, les troubles neurologiques fonctionnels ont un impact majeur sur la qualité de vie des personnes qui en souffrent. Dépendants de facteurs biologiques, psychologiques et sociaux, ils ne sont pas encore complètement élucidés et nécessitent une prise en charge globale.
Les symptômes sont là, une paralysie soudaine ou des tremblements par exemple, mais rien d’anormal ne ressort lors des examens cliniques. Pas de signe d’atteinte neurologique, ni à l’imagerie ni au niveau des analyses biologiques. Pour Zoé*, atteinte de troubles neurologiques fonctionnels (TNF), cela commence par des maux de tête. Elle devient ensuite très sensible à la lumière et au bruit, puis sa vision se brouille. S’ajoutent alors des problèmes d’équilibre. «Les premières manifestations sont apparues il y a deux mois. Je souffrais terriblement et j’avais de la peine à réfléchir», décrit-elle. Très inquiète, elle se rend aux urgences des HUG. Examens neurologiques et prises de sang sont réalisés : tout est parfait. «D’un côté, les nouvelles étaient bonnes mais, de l’autre, mon état continuait d’empirer. Je ne pouvais plus marcher et j’ai finalement été hospitalisée», poursuit la jeune femme de 22 ans.
L’annonce, le moment clé
L’équipe médicale qui la suit, après avoir écarté toute cause physiologique, lui parle alors de TNF. «L’annonce du diagnostic est un moment très important, car les personnes concernées se sont parfois entendu dire : “C’est dans votre tête” ou “Vous n’avez rien”. Aux HUG, c’est un binôme neurologue-psychiatre qui s’en occupe», décrit le Dr Vasileios Chytas, médecin adjoint au Service de psychiatrie de liaison et d’intervention de crise.
La survenue d’un TNF étant souvent reliée à un événement stressant ou traumatique, la prise en charge doit être globale et tenir compte autant du volet somatique (les symptômes) que psychologique.
Approche globale payante
À ce jour, aucun traitement spécifique n’existe, mais des médicaments sont prescrits, notamment en cas de douleur, de dépression ou d’anxiété. La physiothérapie est par ailleurs indispensable pour améliorer les capacités physiques largement mises à mal par la maladie. Un suivi psychothérapeutique ou d’autres approches complémentaires, telles que l’hypnose ou la méditation de pleine conscience peuvent aussi aider. «Notre priorité est d’améliorer la qualité de vie des personnes concernées. Il est indispensable d’opter pour une approche globale, à la fois biologique, psychologique et sociale, qui soit centrée sur les souffrances, aussi bien physiques que psychiques», précise le Dr Chytas.
Environ deux mois après sa prise en charge, notamment à l’Hôpital Bellerive en réadaptation, Zoé va mieux. Grâce à de très nombreuses séances de physiothérapie et d’ergothérapie et une volonté à toute épreuve, elle est rentrée chez elle. Elle marche toujours avec une béquille et ressent encore quelques difficultés d’équilibre. Mais elle a repris ses études. «Ces troubles pourraient revenir, je le sais, mais j’ai appris de mes erreurs et, désormais au moindre signal, je consulterai», conclut-elle.
* Prénom d'emprunt
Qu’en est-il de la recherche ?
Les troubles neurologiques fonctionnels (TNF) constituent un véritable trouble neurologique. Dans le cadre de la recherche en neuro-imagerie, notamment par l’imagerie à résonance magnétique fonctionnelle, des altérations des connexions neuronales ont été repérées. «Ces découvertes récentes prouvent que les TNF sont bien liés à des défauts de la connectivité cérébrale et qu’ils ont, en partie au moins, une base neurobiologique ne relevant pas uniquement d’une cause psychologique. La recherche doit encore mieux comprendre ces phénomènes, mais aussi l’impact possible du stress ou d’un traumatisme psychologique. L’objectif sera à l’avenir d’explorer de nouveaux traitements visant à améliorer cette connectivité altérée», détaille le Dr Vasileios Chytas, médecin adjoint au Service de psychiatrie de liaison et d’intervention de crise.
Texte:
- Clémence Lamirand
Photos:
- Joyce Hesselberth