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  • Giuseppe Costa

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Exprimer ses volontés en matière de soins

Les directives anticipées permettent de déterminer à l’avance les traitements souhaités ou non. Le projet anticipé de soins peut être une alternative.

Comment exprimer vos préférences au sujet de traitements si un jour vous en êtes incapable ? Avec des directives anticipées. Inscrites dans la loi, elles sont l’expression écrite de votre volonté sur le type de soins que vous souhaiteriez recevoir ou non dans des situations données, au cas où vous auriez perdu votre discernement. « Cette démarche s’inscrit dans le droit à l’autodétermination et le principe d’autonomie de la personne. Les directives anticipées aident les médecins à prendre des décisions dans des contextes difficiles, ainsi que les proches qui n’ont plus à se demander ce que la personne aurait souhaité », souligne la Pre Sophie Pautex, nouvelle médecin-cheffe du Service de médecine palliative.

Une aide pour les rédiger

Les volontés exprimées sont les plus diverses : refus d’être réanimé, administration d’antidouleurs, recours à une alimentation artificielle, maintien à domicile le plus longtemps possible, etc. Généralement, une personne pense aux directives anticipées lorsqu’elle est inquiète au sujet de sa santé ou qu’elle commence à imaginer des complications graves de sa maladie. À ce moment, l’aide d’un tiers pour rédiger ses intentions dans un langage intelligible est utile. « Le médecin peut tenir ce rôle afin de formuler de manière réaliste sa pensée. Par exemple, il expliquera à son patient que vouloir une réanimation, mais refuser une hospitalisation aux soins intensifs, peut s’avérer contradictoire », relève la Pre Pautex. Et d’ajouter : « Les directives anticipées ne sont pas que l’expression de refus. Certains patients sont très demandeurs de soins, même s’ils sont très malades. Il est surtout important d’échanger sur les priorités face à la maladie. »

Dans ce document, la personne peut désigner un représentant thérapeutique, chargé de faire respecter ses volontés au cas où elle perdrait sa capacité de discernement. « Mais tant que le patient reste un interlocuteur, les décisions concernant sa prise en charge se prennent avec lui », insiste toutefois la Pre Pautex. Selon une enquête de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) menée en 2017, quelque 10 % de la population de Suisse romande a rédigé des directives anticipées. Comment interpréter ce chiffre modeste ? « Certes, elles sont moins connues qu’en Suisse alémanique, mais dans notre région, on promeut l’autonomie des patients et le partenariat. De plus, les gens connaissent les soins palliatifs et savent qu’on ne va pas s’acharner. Comme ils ont confiance dans la prise en charge, ils ne ressentent pas le besoin d’écrire », répond-elle.

Projet anticipé de soins

Autre approche pour faire part de ses désirs : le projet « Soins coordonnés », lancé en 2015 par l’OFSP dans sa stratégie Santé2020. Il vise lui aussi à renforcer l’autodétermination des patients pour que la prise en charge soit mieux planifiée en fonction de leurs besoins. « Le projet anticipé de soins est un processus actif de communication. On dialogue avec le patient de sa situation, de son évolution, de la survenue possible de complications et de ce que l’on met en place si elles apparaissent. Dans cette discussion, il est fondamental d’inclure les proches et toutes les personnes qui gravitent autour du patient : infirmière, aide-soignante, physiothérapeute, etc. », résume la Pre Pautex. Elle relève encore l’importance de former les médecins de famille à ce type d’entretien et que cela soit mieux rémunéré. Surtout, elle est convaincue du bien-fondé de cette stratégie, encore peu connue du grand public : « Cela améliore la qualité de vie des personnes concernées, la satisfaction des proches et le maintien à domicile ».

« Je ne veux plus d’intrusion dans mon corps »

Jaro, 81 ans, souffre d’une maladie évolutive du foie, d’atteintes du système nerveux périphérique et d’une cardiopathie. Une santé fragile à laquelle s’ajoute le décès de son épouse. Dans ce contexte difficile, il discute du refus de certains actes médicaux avec son fils, qu’il désigne comme représentant thérapeutique. Et il consigne ses volontés dans des directives anticipées. « Mon corps a beaucoup souffert. J’ai un problème au foie, mais je refuse une biopsie pour en savoir davantage. À mon âge, je ne veux plus d’intrusion dans mon corps. J’ai déjà été assez opéré et hospitalisé », dit-il.

Se sentant très affaibli, il manifeste une certaine résignation. « Des gens s’accrochent à la vie à n’importe quel prix, pas moi. Je ne veux pas rentrer dans une dynamique d’acharnement et de surenchère médicale. J’ai pu beaucoup échanger avec mes fils et ils connaissent mes souhaits », ajoute-t-il, serein et fier de l’amour familial qui l’entoure et l’accompagne.

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