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  • André Koller

Photos: 

  • Nicolas Righetti | lundi13

Faciliter la recherche médicale

Les HUG sont leaders dans le projet Swiss Personalized Health Network (SPHN), lancé en 2017 par la Confédération pour lever les obstacles à la recherche.

La recherche médicale clinique, curieusement, s’apparente à une course d’obstacles. Construire un dossier solide, trouver des volontaires, obtenir des consentements, etc., exige une telle somme d’efforts que certains médecins y renoncent. Et pourtant, la crise du Covid-19 vient d’en faire l’éclatante démonstration, la recherche est essentielle.

Osons une métaphore. À l’ère de WhatsApp, la mise en œuvre d’une étude clinique en est encore au stade de la plume, de l’encre et du parchemin. «Au pic de la pandémie, on s’est vite aperçu que l’urgence réclamait autre chose : une base de données accessible et cohérente regroupant tous les cas Covid-19 des HUG», rappelle la Pre Caroline Samer, médecin adjointe agrégée, responsable de l’Unité de pharmacogénomique et thérapie personnalisée.

Berne suit Washington

Ce qui est vrai pour le Covid-19, l’est pour la médecine en général. Barack Obama l’a compris en 2015 en lançant le programme «All of us» visant à créer une base de données génétique et environnementale pour un million d’Américains. Deux ans plus tard, Berne a débloqué 68 millions de francs pour mettre en place le Réseau national pour la santé personnalisée ou Swiss Personalized Health Network.

Avant le Covid-19, les pouvoirs publics étaient motivés surtout par l’avènement de la médecine personnalisée (ou de précision). En effet, celle-ci oblige à repenser de fond en comble les modalités de la recherche. «Si vous voulez tester une molécule pour des patients de plus de 50 ans, fumeurs, atteints d’une tumeur dont le marqueur génétique est XY, vous trouverez très peu de candidats à Genève. Or, pour obtenir des résultats significatifs, des centaines, voire des milliers de patients sont parfois nécessaires», explique le Pr Antoine Geissbühler, médecin-chef du Service de cybersanté et télémédecine.

Base de données nationale

Si la même équipe de recherche peut interroger une base regroupant les données de centaines de milliers de personnes dans toute la Suisse, elle aura non seulement plus de chances de trouver des candidat·es, mais saura très vite si elle en a assez pour démarrer son étude.

C’est l’axe central du projet SPHN : créer une base de données cohérente et commune aux cinq hôpitaux universitaires suisses, puis l’élargir au plan national, voire international. En parallèle, la communauté médicale doit réaménager plusieurs procédures et structures additionnelles. Comme le consentement des personnes, l’interopérabilité des données et les biobanques.

Ces dernières font l’objet de la Swiss Biobanking Platform, dirigée par le Pr Geissbühler, également membre du comité directeur national du SPHN. Le volet «consentement» est géré par la Pre Caroline Samer, cheffe du projet d’implémentation d’infrastructure SPHN pour les HUG. Tandis que le Pr Christian Lovis, médecin-chef du Service des sciences de l’information médicale, est responsable du groupe en charge de l’interopérabilité sémantique des données cliniques. Nom barbare pour faire référence à la capacité d’un système à communiquer avec n’importe quel autre système existant ou… futur.

Atout suisse

L’interopérabilité sémantique est l’un des problèmes scientifiques les plus ardus soulevés par ce projet vaste et complexe. «La décentralisation helvétique, avec les particularismes cantonaux, a finalement tourné à notre avantage. Car, avant tout le monde, nous avons dû apprendre à “traduire”. Cette compétence plutôt rare en informatique sera un atout majeur pour l’extension du réseau en Europe et au-delà», conclut le Pr Lovis, référence nationale dans ce domaine pointu.

Consentement citoyen

Pour simplifier les procédures d’utilisation des données médicales, les hôpitaux universitaires ont créé le consentement dit «général». Soit la possibilité pour chacun et chacune de donner son feu vert une seule fois pour toutes les recherches à venir. Problème ? Une possible perte de transparence. D’où l’idée d’un consentement dynamique, interactif et modulable. «Les personnes décident ce qu’elles partagent et avec qui. Elles peuvent suivre une étude et en connaître les résultats. Et ces choix peuvent être modifiés en tout temps», indique la Pre Caroline Samer, médecin adjointe agrégée, responsable de l’Unité de pharmacogénomique et thérapie personnalisée. Une première version a été testée en 2019. Le consentement dynamique devrait être disponible pour le grand public dès 2022.

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