Anna Ferreira Marques vit depuis vingt ans avec le syndrome des jambes sans repos*. Douleurs et insomnies font partie du quotidien de cette quadragénaire. Son goût pour la vie lui fait maintenir le cap.
Ses yeux d’un bleu intense dégagent une énergie communicative. Anna Ferreira Marques n’est pas du genre à se lamenter sur son sort. Cette Genevoise d’origine ukrainienne travaille dans le domaine de la sécurité. Un poste aux exigences physiques et psychiques intenses, alors qu’elle vit avec plusieurs maladies, dont un syndrome des jambes sans repos (ou restless legs syndrome en anglais (RLS)). « J’ai commencé à avoir des douleurs aux genoux durant ma vingtaine. J’habitais encore en Ukraine. Les médecins me disaient que c’étaient des rhumatismes, mais aucun traitement ne fonctionnait », se souvient cette mère d’un garçon de 11 ans. La jeune femme gère alors ses douleurs, qui surviennent surtout lors de crises ponctuelles, comme elle peut : la natation ou la course à pied la soulagent. Puis elle rencontre son futur mari en Suisse et s’installe à Genève.
Un chemin de croix médical
C’est après sa grossesse, en 2011, que les symptômes au niveau de ses jambes vont s’intensifier. Ils se combineront en plus avec ceux d’un insulinome, une tumeur rare du pancréas qui entraîne une hypersécrétion d’insuline. Anna Ferreira Marques raconte : « Ma grossesse a été compliquée, j’ai dû rester alitée de longs mois. Quelques semaines après mon accouchement, j’ai commencé à ressentir des douleurs insupportables aux genoux. Comme aucun antidouleur ne fonctionnait, je devais prendre de la morphine pour les calmer. Parallèlement, à cause de l’insulinome, je n’arrivais pas à contrôler mes envies de sucre et j’ai pris une vingtaine de kilos. »
Anna Ferreira Marques vivra alors un long chemin de croix médical, entre diagnostics erronés et traitements inadaptés. En incapacité de travailler, elle ira jusqu’à avoir des pensées suicidaires. « On me disait que mes douleurs articulaires étaient dues au climat humide de Genève. On m’a prescrit des antidépresseurs. Et ce n’est que plus tard que j’ai su que ceux-ci étaient contre-indiqués en cas de RLS. »
Mieux gérer les douleurs
Il faudra attendre 2015 pour qu’Anna Ferreira Marques reçoive un diagnostic de RLS par un spécialiste du sommeil. Elle souffre alors en effet d’insomnie chronique, car les mouvements incontrôlés de ses jambes l’empêchent de trouver le sommeil. « Ne pas pouvoir dormir est sans doute le pire symptôme du RLS. Je me sens chroniquement épuisée. Les gens pensent que j’ai des cernes parce que je fais la fête, mais c’est parce que je ne dors pratiquement plus depuis des années. »
Ce diagnostic médical représente toutefois un soulagement : « J’ai pu mettre un nom sur ma souffrance. » Malheureusement, les principaux médicaments disponibles – des dopaminergiques fréquemment utilisés pour la maladie de Parkinson – ne sont pas indiqués dans son cas en raison de leurs effets secondaires et de leurs interactions avec les autres traitements qu’elle prend.
C’est le retour à la case départ : Anna Ferreira Marques doit se résoudre à une simple gestion de ses douleurs aux membres inférieurs. « C’est très frustrant de ne pas avoir de traitement, j’ai dû apprendre à vivre avec mes symptômes. » Actuellement suivie par l’équipe du Dr Stephen Perrig, neurologue référent au Centre de médecine du sommeil des HUG, elle entrevoit de petites améliorations. Grâce notamment à des séances de physiothérapie combinée à de l’acupuncture, ainsi qu’à une surveillance constante de son taux de ferritine : « Dès qu’il baisse, je prends des compléments et cela m’aide à anticiper les crises. Les bains chauds me soulagent également. » Elle confie que son généraliste et l’équipe des HUG sont ses anges gardiens : « Leur soutien me permet de ne pas perdre espoir. » Car malgré les difficultés, Anna Ferreira Marques garde des projets plein la tête. Dès que sa santé ira mieux, elle souhaite notamment lancer une entreprise.
Texte:
- Geneviève Ruiz
Photos:
- Hervé Annen