Texte: 

  • Geneviève Ruiz

Photos: 

  • Hervé Annen

« J’avais besoin de comprendre l’origine de mes douleurs »

Audrey Leclerc a vu sa carrière de photographe interrompue par des douleurs chroniques au dos, devenues invalidantes. Récemment, elle a intégré un programme des HUG qui lui offre de nouvelles perspectives pour gérer ses symptômes et l’accompagne vers une meilleure qualité de vie.

Audrey Leclerc C'est par amour qu’Audrey Leclerc s’est établie à Genève, alors qu’elle avait une trentaine d’années. Cette Parisienne diplômée en histoire de l’art, qui avait beaucoup voyagé auparavant, décide de se consacrer à la photographie. «Je me suis spécialisée dans les portraits, les mariages et les naissances», raconte-t-elle. Mais ce travail, bien qu’épanouissant, est exigeant en énergie : ses journées dépassaient souvent dix heures, sans compter les week-ends. «Je tenais bon, mais je me suis progressivement déconnectée de mon corps», se remémore la photographe, aujourd’hui âgée de 49 ans.

Au bord du gouffre

Adolescente, Audrey avait déjà souffert de maux de dos, mais ces épisodes étaient brefs et vite oubliés. En 2018, ses douleurs deviennent régulières. Un rhumatologue lui prescrit alors des médicaments antalgiques. Elle continue de travailler sans relâche, mais la pandémie de Covid-19 met brutalement fin à cette dynamique. «Du jour au lendemain, je suis passée d’un rythme hyperactif à un confinement total, sans travail», confie celle qui se décrit comme hypersensible. «J’étais au bord du gouffre lorsque j’ai décidé de réaliser des autoportraits dans mon appartement pour illustrer mon vécu.» Non seulement ce projet la ressource, mais en plus il rencontre du succès, aboutissant à une exposition et à un livre intitulé «Quarantaine» (auto-édition, 2021).

Opération en urgence

«Après la pandémie, je me sentais de plus en plus anxieuse. En tant qu’indépendante, je portais beaucoup sur mes épaules», admet Audrey Leclerc. Elle trouve cependant la force, en 2022, de se spécialiser dans un nouveau domaine, les portraits aquatiques. Mais une année plus tard, elle commence à boiter. Après une imagerie à résonance magnétique (IRM) de la colonne vertébrale, son médecin lui prescrit une infiltration, qui échoue. Audrey boite de plus en plus, jusqu’à ce que le 19 décembre 2023, alors en pleine séance photo, elle ne parvienne subitement plus à poser le pied par terre. Sa cliente la conduit à l’hôpital où un examen clinique suggère une atteinte neurologique et une IRM montre qu’une hernie discale en est probablement la cause. Audrey est opérée en urgence.

Sa rééducation durera six mois. La quadragénaire retrouve une certaine mobilité et reprend son activité professionnelle. Mais quelques mois plus tard, ses douleurs reviennent. «Je devais m’allonger toutes les dix minutes, je pouvais à peine m’asseoir et encore moins porter de poids. C’était un quotidien impossible. J’ai dû arrêter mon activité, la mort dans l’âme.» C’est alors que le Programme multidisciplinaire individualisé du dos (ProMIDos) des HUG, conçu pour les personnes souffrant de douleurs chroniques du dos, lui est proposé par sa médecin.

Appréhender la douleur autrement

Audrey Leclerc y rencontre d’autres personnes qui vivent avec des douleurs quotidiennes et partage des moments de connexion intenses. Des ateliers sur le fonctionnement de la douleur abordent la synergie entre le corps, les émotions et les liens sociaux. Alors qu’elle avait une vision mécanique de son mal de dos, de nouvelles perspectives s’ouvrent à elles et lui font prendre conscience de l’importance des facteurs contextuels tels que les croyances erronées ou les expériences passées. «J’avais besoin de comprendre l’origine de mes douleurs afin de les appréhender différemment. Je conçois désormais à quel point ma colonne vertébrale est sensible, mais solide. J’ai aussi senti que l’essentiel est de lâcher prise, de respirer profondément, de ne pas être dans l’évitement d’une situation difficile, de bouger et de tenter de verbaliser tout ce qui entrave mon bien-être.» Depuis ProMIDos, la vie d’Audrey Leclerc s’est améliorée : elle peut à nouveau faire des projets, sans médicaments antidouleur.
 

Programme multidisciplinaire individualisé du dos (ProMIDos) des HUG : conçu pour accompagner les personnes souffrant de douleurs chroniques du dos, il est prévu sur deux mois à raison de huit à dix heures par semaine. Il s’agit d’une approche globale grâce à une équipe de médecins rhumatologues, d’un médecin spécialisé en rééducation, d’un psychiatre, de physiothérapeutes, d’ergothérapeutes et d’une psychologue. L’objectif est de réduire les symptômes, mais aussi d’aider les personnes à reprendre des activités délaissées et, finalement, le contrôle de leur vie.

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  • Geneviève Ruiz

Photos: 

  • Hervé Annen
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