Les affections qui peuvent toucher le poumon sont nombreuses. Elles sont prises en charge au Service de pneumologie, auquel la Pre Anne Bergeron, récemment arrivée aux HUG, entend bien donner un nouveau souffle. Rencontre.
Pulsations La pneumologie est une spécialité très vaste qui prend en charge de nombreuses pathologies. Cette diversité est-elle une force ou une faiblesse ?
Pre Anne Bergeron Les deux à la fois ! C’est clairement une richesse, mais aussi une difficulté, car cela nécessite des expertises multiples. J’ai l’habitude de dire que c’est une spécialité « caméléon », qui doit s’adapter à l’environnement dans lequel elle évolue et à de nombreuses pathologies, technologies et prises en charge. Le service a la chance de rassembler des spécialistes de tous les domaines de la pneumologie : maladies vasculaires pulmonaires, insuffisance respiratoire sévère, asthme, médecine du sommeil, cancer du poumon, tuberculose, mucoviscidose, etc.
Quels sont les défis actuels de la pneumologie en termes de santé publique ?
Les maladies pulmonaires ont un sombre palmarès. La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) et les infections des voies respiratoires basses figurent ainsi respectivement en troisième et quatrième places des principales causes de mortalité dans le monde. Le cancer du poumon, quant à lui, est un des cancers les plus meurtriers. En Suisse comme ailleurs, la question du dépistage systématique se pose, la balance bénéfice-risque étant encore discutée.
Assiste-t-on à une augmentation, ces dernières années, des maladies respiratoires favorisées par l’environnement et les habitudes de vie ?
Il y a une progression de certaines maladies respiratoires, mais il est difficile d’évaluer le rôle exact de la pollution dans leur apparition ou aggravation. Ceci a été montré pour les exacerbations de fibrose pulmonaire idiopathique ou l’asthme, par exemple. Quant au tabac, il est aujourd’hui clairement identifié comme la première cause de BPCO et de cancer du poumon. Si, pour ce dernier, l’immunothérapie et les thérapies ciblées ont permis d’améliorer clairement le pronostic des malades, pour la BPCO, parent pauvre des maladies pulmonaires, il existe encore peu de traitements réparateurs efficaces. D’où l’importance d’intensifier la prévention pour sensibiliser la population aux dangers du tabagisme.
Votre spécialité ce sont les maladies interstitielles pulmonaires. Quelles sont-elles et qui touchent-elles ?
Il existe plus de deux cents maladies interstitielles pulmonaires, dont la plupart sont rares. Elles résultent de la détérioration des alvéoles (sacs d’air des poumons), par une inflammation et une fibrose, responsable de différents symptômes respiratoires comme une toux ou un essoufflement, et parfois une insuffisance respiratoire. Parmi les affections les plus courantes, la sarcoïdose est une maladie pouvant affecter différents organes. Elle touche des hommes et des femmes de tout âge. Sa cause est mal identifiée, ce qui est le cas également de la fibrose pulmonaire idiopathique. Celle-ci concerne le plus souvent des hommes fumeurs âgés de plus de 40-50 ans. Certaines autres pneumopathies interstitielles compliquent une maladie auto-immune comme la sclérodermie. Enfin, la pneumopathie d’hypersensibilité, autre maladie interstitielle fréquente, concerne des personnes soumises – souvent dans leur environnement professionnel – à certains antigènes (moisissures, poussières, détergents, etc.).
Existe-t-il des traitements efficaces pour ces maladies ?
Le grand enjeu est de les détecter tôt, afin de retarder l’évolution fibreuse et l’altération de la fonction respiratoire. Je suis agréablement surprise de la grande sensibilisation à ces pathologies des médecins de premier recours ici à Genève, qui évoquent le diagnostic de pneumopathie fibrosante suite à l’auscultation pulmonaire et adressent ces patients et patientes à un ou une pneumologue avant même l’apparition de symptômes respiratoires. La mise en place des traitements dépend ensuite de la cause de la maladie qu’il est donc important d’identifier. Les thérapies dont nous disposons consistent surtout à freiner l’évolution fibrosante. Nous espérons ouvrir prochainement dans notre service de nouveaux essais thérapeutiques, notamment pour la fibrose pulmonaire idiopathique.
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décès prématurés par an en Suisse sont provoqués par la pollution de l’air (Source : OFEV).
Texte:
- Clémentine Fitaire
Photos:
- François Wavre | lundi 13