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L’anesthésiste, spécialiste de la douleur

Sa présence est requise hors des blocs opératoires, là où il faut traiter la douleur. Particulièrement à la Maternité.

C’est une évolution majeure et récente des mentalités: le seuil de tolérance pour la souffrance en milieu hospitalier est aujourd’hui proche du zéro. Du coup, et pour répondre à ce besoin, les techniques toujours plus sûres développées par les anesthésistes ont quitté les blocs opératoires. Elles sont désormais largement utilisées en chambre pour le traitement des douleurs postopératoires ou même chroniques, ainsi qu’à la Maternité.

Il y a 40 ans, avoir mal à l’hôpital était admis comme un effet secondaire certes fâcheux, mais inévitable. D’abord, il fallait survivre. « Au 21è siècle, les patients sont plus exigeants. De plus, les recherches ont montré qu’une douleur traitée immédiatement ne deviendra pas chronique. L’anesthésiste est donc intégré d’emblée aux stratégies thérapeutiques », souligne le Dr Benno Rehberg, médecin adjoint agrégé au service d’anesthésiologie.

Les progrès qui ont permis cette évolution sont doubles. D’abord, les produits utilisés sont plus sûrs, moins toxiques et leur gamme s’est élargie. Ensuite, l’échographie a amélioré la précision des gestes techniques. En effet, grâce à cet outil, le praticien visualise parfaitement le champ opératoire. Il peut donc injecter au plus près du nerf ciblé le produit anesthésique ou mettre en place un cathéter (un dispositif fixe en forme de tube qui sert à introduire un médicament).

Postopératoire

Des douleurs chroniques aux accouchements, l’antalgie constitue une vaste discipline. Toutefois, les soins postopératoires représentent aujourd’hui encore le principal champ d’action des anesthésistes. Ces derniers prescrivent les médicaments analgésiques et sont responsables du patient durant les 24 heures qui suivent l’intervention chirurgicale. Après une opération lourde – thorax, abdomen, os – ils posent les cathéters périnerveux et, avec les infirmières spécialisées en antalgie, surveillent l’évolution du patient.

Pourtant, c’est en obstétrique que l’arrivée récente de l’anesthésiste est la plus spectaculaire. Aujourd’hui, neuf parturientes sur dix ont recourt à une péridurale lors d’un accouchement. Avant les années 80, cette procédure était encore rare. « Il faut dire qu’il y a trente ans, la péridurale risquait de prolonger la durée du travail. Alors que maintenant les effets secondaires sont très faibles », rappelle le Dr Rehberg.

Douleurs chroniques

Les anesthésistes, en première ligne dans les cas aigus, ont fait un pas de plus hors des blocs. Ils s’intéressent désormais aux douleurs chroniques. Deux médecins du service d’anesthésiologie – qui en compte une centaine – sont entièrement dévoués à cette tâche. Ils emploient des dispositifs de pointe : des électrodes pour désensibiliser des nerfs et prochainement des neurostimulateurs actifs de la moelle épinière afin de stopper la transmission de la douleur. « Dans ce domaine, nous travaillons avec le centre de la douleur et le service de neurochirurgie au sein de groupes multidisciplinaires composés de psychologues et de psychiatres », précise le Dr Rehberg.

L’anesthésiste visualise le nerf ciblé sur une échographie.

Et l’hypnose ?

Mais comment traiter la douleur chez des patients atteints d’une phobie de l’aiguille, de l’anesthésie générale ou des salles d’opération (oui, c’est possible) ? La solution existe aux HUG. Elle s’appelle hypnose. « On ne parle pas des tours de passe-passe de music-hall. Mais bien de la technique thérapeutique qui utilise le phénomène, naturel et banal, de l’hyperfocalisation », précise la Dre Irène Iselin, médecin adjointe au service d’anesthésiologie.

Hyperfocalisation, qu’est-ce donc ? Tout simplement cet état mental particulier quand l’attention est entièrement absorbée par un livre, un film ou un jeu vidéo passionnant. « Dans cet état, les personnes sont plus accessibles aux suggestions. Le thérapeute peut alors agir au niveau des représentations pour vaincre une peur ou modifier les perceptions », reprend la Dre Iselin. Aux HUG, l’hypnose est utilisée pour surmonter un stress péri-opératoire, lutter contre des douleurs aiguës induites par certains soins ou encore contre des douleurs chroniques.

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