Texte: 

  • Clément Etter

Photos: 

  • Bogsch & Bacco

Le bruxisme, fréquent mais pas anodin

Grincement ou serrage des dents involontaire, le bruxisme est un phénomène courant qui porte atteinte aux dents et aux articulations de la mâchoire s’il n’est pas pris en charge. Un trouble dont la dimension psycho-émotionnelle est très présente, mais qui se traite facilement.

Touchant environ 70 % de la population, principalement des femmes, le bruxisme est une anomalie du fonctionnement masticatoire. « Ce trouble est caractérisé par des mouvements inconscients de la mandibule, l’os qui forme la mâchoire inférieure. Cela peut être des grincements ou le serrement des dents. Ils surviennent le plus souvent la nuit mais parfois aussi durant la journée, ou les deux », explique le Pr Paolo Scolozzi, chirurgien et médecin-chef du Service de chirurgie maxillo-faciale et buccale.

Les symptômes qui alertent

La douleur est le symptôme principal, résultant «d’une contracture et d’une inflammation des muscles de la mastication en raison de leur sollicitation continue, qui peut aller jusqu’à donner des migraines. Des douleurs au niveau des articulations temporo-mandibulaires (qui relient un os proche de l’oreille à la mâchoire inférieure) peuvent aussi être ressenties», détaille le chirurgien. Parfois, c’est la ou le conjoint qui remarque le bruit du grincement durant la nuit. Le bruxisme peut aussi entraîner des craquements au niveau de la mâchoire et a tendance à créer des mâchoires très carrées chez les personnes atteintes.

Conséquences peu anodines

Non traité, le bruxisme provoque des troubles à long terme. «Il peut y avoir une luxation des disques dans l’articulation de la mâchoire. Cela se traduit par des craquements, notamment au moment des repas. À terme, ces luxations peuvent mener à des blocages de la mâchoire, une limitation de la fonction masticatoire et des douleurs pouvant être handicapantes. Si la situation évolue, le bruxisme peut finalement conduire à l’arthrose des articulations temporo-mandibulaires», prévient le Pr Scolozzi. Au niveau dentaire, ce trouble provoque aussi une usure et une abrasion, donnant un aspect «limé» aux dents.

Une dimension psycho-émotionnelle

La composante psychologique et émotionnelle (colère, anxiété, stress) joue un rôle déterminant dans l’apparition et l’entretien du bruxisme. Des troubles de l’occlusion dentaire peuvent aussi être en cause, liés à la position des dents, causant des contacts anormaux entre elles. Ces troubles peuvent être congénitaux, traumatiques (avec ou sans fracture des mâchoires) ou dus à un défaut de posture chronique lié à certaines professions. Des maladies neurologiques chroniques, des produits comme les amphétamines et des antidépresseurs, ou un problème infectieux peuvent également causer le bruxisme.

Des traitements efficaces

Le traitement le plus efficace est le port d’une gouttière (lire encadré). Il s’agit d’un appareil dentaire réalisé à partir d’empreintes recouvrant les dents. L’épaisseur de ce dispositif empêche les dents de se toucher et étire le muscle de la mâchoire. La gouttière se porte généralement la nuit, mais peut aussi s’utiliser la journée. En cas de phase très aiguë et inflammatoire, des séances de physiothérapie sont d’abord recommandées pour détendre les muscles.

Enfin, il est possible d’associer le port de la gouttière à une méthode appelée biofeedback, qui permet de prendre conscience du problème. «Par exemple, on peut coller des étiquettes "ne pas grincer des dents" sur son ordinateur ou des gommettes colorées pour s’en rappeler et ainsi se conditionner», ajoute le spécialiste. Grâce à ces traitements, le bruxisme disparaît dans la majorité des cas. Pour une minorité de personnes, il passe toutefois par différentes phases : il disparaît pendant un temps après avoir été soigné, puis réapparaît à la suite d’un stress ou un autre facteur psychologique.

« Les douleurs étaient présentes en continu »

« Au début, j’avais des étourdissements. J’avais aussi mal à la tête et à la mâchoire. Par la suite, les douleurs étaient présentes en continu, tous les jours. Je ne connaissais pas ce trouble et mon généraliste n’a pas pu m’aider », témoigne Sofia*. Aux HUG, le diagnostic a pu être posé : bruxisme nocturne. Après des séances de physiothérapie maxillo-faciale, une gouttière à porter la nuit lui est prescrite. « Depuis, les douleurs ont fortement diminué. J’ai aussi recouru à de l’acupuncture pour m’accompagner, car le stress et un choc dans ma vie sont à l’origine du bruxisme. »

* Prénom d'emprunt

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