Le concept de rétablissement en santé mentale place les personnes au centre de leur traitement. Une véritable collaboration se met alors en place entre patient ou patiente et équipes soignantes.
Les maladies psychiatriques, souvent chroniques, peuvent donner l’impression aux personnes concernées qu’elles ne s’en remettront pas. Et pourtant, c’est possible. Le Département de psychiatrie fait évoluer ses pratiques et mise sur le concept de rétablissement en santé mentale. Il se focalise sur l’espoir de retrouver un équilibre de vie et de parvenir à surmonter les difficultés liées au trouble psychique. «Le concept de rétablissement est né directement des personnes concernées par les troubles psychiatriques en réaction au système médical qui, par le passé, réduisait le ou la malade à son diagnostic. Ce principe cherche à sortir de l’approche paternaliste du ou de la médecin envers son ou sa patiente pour créer un véritable partenariat», explique le Dr Alexandre Wullschleger, médecin adjoint au Service de psychiatrie adulte.
Mettre la personne atteinte de troubles psychiques au centre de son traitement, en s’appuyant sur ses ressources personnelles, son réseau familial et amical ainsi que sur la communauté dans laquelle elle évolue, est un des piliers du rétablissement. «Le ou la médecin cherche à connaître les besoins de son ou sa patiente, à comprendre où se situent ses difficultés, quelles sont les barrières qui l’empêchent de se réaliser dans sa vie.»
Afin de repenser en profondeur la prise en charge, le Département de psychiatrie est en train de développer trois grands projets. Le premier consiste en une évaluation systématique du parcours des personnes souffrant de troubles psychotiques prises en charge en ambulatoire, dans le but de leur fournir des soins adaptés à leur parcours et à leurs besoins. Elle se fait via des questionnaires spécifiques.
Le deuxième projet vise à encourager la participation active des personnes hospitalisées pour que les soins correspondent mieux à leurs besoins individuels. Ce projet, nommé Modèle inclusif genevois (ModInG), implique une réorganisation des unités hospitalières. «Nous cherchons à ce que les discussions entre les corps médical et soignant soient le plus transparentes possible et incluent patients ou patientes et proches. Nous voulons également limiter le recours aux mesures de contrainte parfois utilisées dans certaines situations graves où la personne se met en danger ou met en danger autrui», poursuit le Dr Wullschleger.
Anticiper la crise
Enfin, le troisième volet concerne la diffusion dans le Département de psychiatrie du plan de crise conjoint. «Celui-ci fait partie des déclarations anticipées qu’une personne peut signer. Dans une période calme, elle se met d’accord avec les équipes de soins sur les médicaments, les traitements, les manières d’intervenir qu’elle souhaiterait avoir en cas de crise, tout comme sur les signes avant-coureurs de celle-ci. Ce document est signé tant par le ou la personne concernée que par sa ou son médecin. Cela permet, en cas de crise, d’établir un plan de soin personnalisé et concret qui respecte les vœux de la personne concernée.»
Mieux comprendre la part subjective de la maladie
Le rétablissement en santé mentale s’appuie aussi sur l’expérience et l’expertise des personnes vivant avec la maladie, appelées paires. «Ayant moi-même souffert de problèmes de santé mentale, j’ai une autre vision que celle du personnel soignant sur la maladie. Être paire praticienne signifie professionnaliser l’expérience de rétablissement et en faire profiter tant les malades que les équipes soignantes. Désormais, le partage de l’expérience que j’ai vécue – tout comme celle d’autres paires – est pris en compte par les institutions», explique Élisabeth Sturm, paire praticienne, qui travaille à 20 % pour le Département de psychiatrie. Parmi ses tâches, elle s’est attelée à établir, en collaboration avec le personnel soignant, une grille d’évaluation pour mieux cerner le parcours des personnes atteintes de troubles psychotiques. Ces questionnaires abordent l’anamnèse, le diagnostic et l’évaluation des ressources personnelles. Ils s’intéressent aussi au vécu de l’individu tout au long de son parcours de soins et abordent sa qualité de vie, les barrières qui l’empêchent d’aller mieux, entre autres. La trentenaire est aussi très impliquée dans la formation. Par le passé, elle a travaillé au sein du Collège de rétablissement – qui offre des formations aux personnes concernées par la santé mentale – en cherchant à développer les compétences des malades qui favorisent leur rétablissement.
Texte:
- Yseult Théraulaz
Photos:
- Andrea De Santis
Collège de rétablissement
Formations brèves et gratuites ouvertes à tous et toutes qui portent sur le bien-être, la résilience et le rétablissement en santé mentale.