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Première greffe de rein réalisée au Cameroun avec l’aide des HUG

La collaboration entre les HUG et l’Hôpital général de Yaoundé en matière de transplantation s’est concrétisée le 10 novembre dernier. Il s’agit également d’une première pour l’Afrique centrale.

C’est une intervention courante en Suisse, mais un grand pas technologique porteur d’espoir pour le Cameroun et l’Afrique centrale. Le 10 novembre dernier, le Pr Thierry Berney, médecin-chef du Service de transplantation des HUG, a réalisé avec une équipe médicale locale la première greffe de rein sur territoire camerounais. Il s’agit également d’une première pour l’Afrique centrale.

Âgé de 34 ans, le receveur, Bertrand, était sous dialyse depuis onze ans en raison d’une insuffisance rénale chronique. Son frère, Yves, d’une année son cadet, était disposé à lui donner un rein. Grâce à une collaboration de longue date entre l’Hôpital général de Yaoundé et les HUG, l’opération a eu lieu. Les préparatifs ont commencé en janvier 2019, avec plusieurs déplacements de part et d’autre.

La transplantation s’est déroulée avec succès et les frères se portent bien. « Nous avons commencé à effectuer le prélèvement vers 9h du matin avec l’urologue Justin Kamga, assistés de deux chirurgiens juniors qui n’avaient encore jamais participé à un prélèvement, et nous avons terminé la greffe vers 16h. J’ai travaillé en alternance entre les deux interventions. Le prélèvement en lui-même a duré environ 2h30. Ensuite, il a fallu préparer le greffon pour la transplantation. Après l’avoir perfusé avec du liquide de préservation, j’ai réalisé une reconstruction artérielle, car le greffon présentait deux artères. Enfin, la greffe en elle-même a duré environ trois heures, avec quelques interruptions en cours d’opération », raconte le Pr Berney.

Processus d’autonomisation 

Il n’a jamais été question de faire un coup d’éclat qui resterait sans suite : cette première s’inscrit dans le cadre d’une collaboration qui vise à augmenter l’expertise de l’équipe médicale de l’Hôpital général de Yaoundé. « Nous avons organisé une séance de débriefing après la greffe pour déterminer ce qu’il fallait améliorer ou aménager pour que d’autres patients insuffisants rénaux puissent être transplantés sur place », affirme le spécialiste. Le directeur général et la cheffe du Service de néphrologie de l’hôpital camerounais se déplaceront à Genève au début de l’année 2022 pour prévoir la suite.

Le chirurgien vasculaire Marcus Fokou, présent le 10 novembre, était déjà venu observer une greffe de rein aux HUG pendant la phase de préparation de l’opération. « L’idée est d’effectuer moi-même plusieurs autres greffes avec son aide, puis nous inverserons les rôles : il les pratiquera et je serai présent à ses côtés pour l’assister en cas de problème. Je jouerai le rôle de "back-up" jusqu’à ce qu’il n’ait plus besoin de moi », précise le Pr Berney. Deux ou trois transplantations supplémentaires pourraient ainsi être planifiées au cours du second trimestre 2022.

Une tradition de longue date

La collaboration entre les Universités de Yaoundé et de Genève a commencé vers 1980 et a mené à la signature d’une nouvelle convention entre les HUG et le Ministère de la santé camerounais en 2013. La greffe réalisée le 10 novembre s’inscrit dans la lignée de cette tradition de longue date. Le directeur général de l’hôpital, le Pr Vincent de Paul Djientcheu, et deux néphrologues camerounais qui ont participé à cette première ont d’ailleurs effectué une partie de leur formation aux HUG.

Le Cameroun devient ainsi le dixième pays d’Afrique subsaharienne (et le premier d’Afrique Centrale) à pratiquer la transplantation rénale, après l’Afrique du Sud, le Nigeria, le Kenya, l’Éthiopie, la Mauritanie, le Rwanda, le Soudan, le Ghana et la Côte d’Ivoire. Il est important que le cercle de ces pays augmente, car la transplantation rénale est le meilleur traitement de suppléance rénale et son coût reste inférieur à long terme à celui de la dialyse. Actuellement, on estime que 2,5 millions de personnes souffrent de maladie rénale au Cameroun, dont 330 000 dans la ville de Yaoundé.

Le Pr Thierry Berney avec Bertrand, le receveur.
Le Pr Thierry Berney avec Bertrand, le receveur.

Cinq stades pour l’insuffisance rénale

Le rôle principal des reins est de filtrer le sang. Logiquement, il y a une accumulation de déchets dans l’organisme lorsque cette fonction est altérée. L’insuffisance rénale chronique correspond à la diminution progressive et irréversible des performances de l’organe.

La maladie progresse plus ou moins lentement, avec des paliers évolutifs de sévérité croissante, allant du stade 1 au stade 5. Le dernier stade est celui de l’insuffisance rénale terminale : le rein n’assure plus ses fonctions vitales et un traitement s’impose pour y suppléer. La greffe de rein est la meilleure solution d’un point de vue médical. C’est également la plus économique. La dialyse constitue l’autre option. Elle consiste à filtrer plusieurs fois par semaine le sang du ou de la patiente à travers une machine faisant office de rein artificiel.
 

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