Discipline en plein essor, la procréation médicalement assistée (PMA) doit composer avec une opinion publique sensible et des progrès technologiques rapides et constants.
Les couples infertiles recourent toujours davantage à la PMA. Entre 2002 et 2010, leur nombre a doublé, passant de quelque 3000 par an à plus de 6000. Depuis 2010, chaque année en Suisse environ 2000 bébés voient le jour grâce à cette technique.
Sur le plan médical, l’infertilité est définie comme l’incapacité à obtenir une grossesse après 12 mois ou plus de rapports sexuels non-protégés. Elle affecte les couples sur les plans physique, psychique et social. « Ce n’est donc pas un hasard si les HUG proposent une prise en charge globale, comprenant un accompagnement psychologique dès la première consultation (lire Et si c’était psy?) », indique la Dre Isabelle Streuli, médecin adjointe agrégée responsable de l’unité de médecine de la reproduction et d’endocrinologie gynécologique.
Débat public
La première naissance après une fécondation in vitro remonte à 1978 au Royaume-Uni. La décennie suivante voit arriver la stimulation hormonale, la ponction des ovules guidée par échographie et la congélation des embryons. Dans les années 90, apparait l’injection intra-cytoplasmique de spermatozoïde (ICSI) – prononcez ixi – pour le traitement des infertilités d’origine masculine (lire Des bébés grâce à la FIV). Plus récemment, le développement de la vitrification – une méthode de congélation – permet désormais une congélation d’ovules aux femmes atteintes de maladies pouvant altérer leur fertilité future.
Toutefois, « avancées technologiques » ne riment pas toujours avec «pratiques cliniques». En effet, les convictions éthiques et religieuses tendent à se focaliser sur la procréation. Par conséquent, l’intervention de la médecine dans ce domaine fait l’objet d’un débat public récurrent. Ceci explique certaines lenteurs. « La loi suisse sur la PMA détermine combien d’embryons peuvent être développés et implantés et limite la conservation d’ovules fécondés à cinq ans. Le don de sperme est autorisé chez les couples hétérosexuels mariés alors que le don d’ovule, le diagnostic génétique préimplantatoire et la maternité de substitution sont interdits », remarque la Dre Streuli.
La congélation d’ovules
D’un autre côté, les évolutions sociétales sont rapides et parfois surprenantes. Qui n’a pas lu que Facebook ou Apple soutiennent financièrement les collaboratrices qui désirent congeler leurs ovules ? « Les demandes de congélations par choix personnel existent aussi aux HUG. On en compte aujourd’hui une dizaine par an. Mais elles émanent moins d’employées carriéristes que des femmes proches de la quarantaine qui viennent de se séparer », reprend la spécialiste.
Reste que la PMA est bien entendu destinée en priorité aux couples souffrant d’infertilité. Qu’elle soit d’origine masculine, féminine, mixte ou sexuelle (lire Et si c’était psy ?). Les causes de l’infertilité masculine sont liées à la production des spermatozoïdes et à leur transport.
Chez les femmes, les causes de l’infertilité sont classées en plusieurs catégories : les problèmes touchant l’utérus, les trompes de Fallope ainsi que le fonctionnement des ovaires et leur capacité à ovuler. L’endométriose est également un facteur d’infertilité (lire L’endométriose est sous-diagnostiquée). Et bien entendu, il y a l’âge. « Il faut savoir que le nombre et la qualité des ovules diminuent avec l’âge. A plus de 43 ans les chances de succès d’une PMA sont quasi nulles », précise la Dre Streuli (lire l’infographie).
Aux HUG, la FIV représente environ la moitié des traitements. Les autres approches de l’infertilité proposées sont l’induction et la stimulation de l’ovulation, les inséminations et la chirurgie. L’assurance maladie de base couvre les investigations médicales, les inductions de l’ovulation, trois stimulations et inséminations par grossesse. La PMA, en revanche, est à la charge du couple et coûte entre 4000 et 6000 francs aux HUG (hors médicaments).
Chaque cas est présenté au colloque hebdomadaire multidisciplinaire qui réunit gynécologues spécialisés, psychiatres, biologistes et infirmières.
L’humain au premier plan
Entreprendre un traitement pour avoir un enfant n’est jamais anodin. Tout au long de ce parcours riche en émotions, les cinq infirmières de procréation médicalement assistée (PMA) apportent aux couples un indéfectible soutien psychologique, logistique et pédagogique. « Leur rôle est capital. Elles sont le fil rouge et les garantes d’une bonne coordination tout au long de la prise en charge », appuie Séverine Baudry, infirmière responsable d’unité au service de gynécologie.
S’il y a bien sûr les soins à réaliser, leur travail se situe d’abord au niveau humain. « Nous devons anticiper les besoins sur les plans personnel, social ou psychologique. C’est une période de leur vie où les couples se posent une foule de questions essentielles pour eux. Nous sommes là pour y répondre de la meilleure façon possible », indique Laurence Fonteneau, infirmière au service de gynécologie et d’obstétrique.
Maris et femmes reçoivent des informations sur le cycle de la fécondité naturelle et des explications sur les différentes causes d’infertilité. « Et lorsqu’une décision de traitement a été prise, nous nous assurons que la méthode choisie a été bien comprise et nous détaillons les diverses étapes de la prise en charge », conclut Valérie Morin Yavuzes, également infirmière au service de gynécologie et d’obstétrique.
Dossier Infertilité
- Toujours plus de couples recourent à la PMA
- Fertiday : bilan de couple express
- Des bébés grâce à la FIV
- Et si c’était psy ?
- L’endométriose est sous-diagnostiquée
Texte:
- André Koller
Photos:
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