Greffé du foie à 14 mois, Gaëtan fait un tour de Suisse à vélo pour sensibiliser la population au don d’organes.
Gaëtan naît le 28 mars 1995. Très vite, ses parents se rendent compte que quelque chose ne joue pas. «Il était tout jaune à trois semaines», se souvient Urbain, son père. Implacable, le verdict ne tarde pas à tomber: cirrhose du foie. Le petit est mis en liste d’attente à six mois. La délivrance survient le 6 mai 1996. «Depuis, j’ai deux dates d’anniversaire», relève Gaëtan. «Il ne lui restait que deux jours à vivre selon les estimations de la Pre Le Coultre qui l’a opéré», souffle Janick, sa mère. Cette renaissance n’est pas sans difficultés. D’abord, les six pénibles mois d’hospitalisation qui ont suivi la greffe du foie. «Il était nourri avec une sonde, a été réopéré après une semaine et a fait une intoxication aux médicaments», se souvient sa maman.
Boîte de vie
Ensuite, Gaëtan vit une enfance et une adolescence difficiles. En plus des médicaments à ingérer et des contrôles fréquents à l’hôpital, il y a le regard des autres voire la moquerie autour de certains effets secondaires (eczéma, hyperpilosité). «Je ne m’aimais pas. Je n’étais pas comme les autres. Aujourd’hui, je ne me considère plus comme malade», dit-il. Même si le pilulier présent sur la table de la cuisine pourrait lui rappeler sa différence. «C’est ma boîte de vie», s’exclame Gaëtan, sourire en coin. Un médicament antirejet à prendre le matin et un autre le soir. «Il en a pris jusqu’à 24 par jour», précise le papa. Il effectue encore une prise de sang tous les trois mois chez son médecin traitant et un bilan annuel complet, sur une journée, aux HUG. Des moments qu’il a complètement métabolisés. «J’ai intégré cela dans ma vie et me sens libre. Je peux faire autant de sport que je veux et tout manger… hormis du pamplemousse qui interfère avec les immunosuppresseurs.»
Le jeune homme est aujourd’hui bien dans sa peau. Il croque la vie à pleines dents. Apprenti dessinateur en bâtiment, il s’investit totalement dans son travail. «Je suis un peu extrémiste. Lorsque quelque chose me plaît, je me donne à fond. En ce moment, par exemple, j’occupe tous mes week-ends avec un projet de trois immeubles d’habitation au label Minergie® que je dois présenter au centre de formation.» Il met cette même vitalité dans le sport. «Lorsque je cours ou je pédale, je me donne à fond pour ceux qui ne peuvent pas le faire parce qu’ils sont en liste d’attente. J’ai toujours une pensée pour eux.»
Promouvoir le don
L’an dernier, la rencontre avec la mère d’un donneur est un détonateur. «Elle m’a dit qu’elle aurait été égoïste de garder son fils en mort cérébral. Désormais, elle parle des personnes qui ont reçu des organes comme de ses petits-enfants.» Bouleversé par ces propos, il s’accepte définitivement comme il est et décide lui aussi d’agir pour promouvoir le don d’organes. Ce sera un tour de Suisse à vélo avec son père, en six étapes d’une centaine de kilomètres, du 23 au 28 juin, avec une arrivée à Genève à l’occasion du MaraDon.
«Je veux montrer qu’on peut mener une vie comme tout le monde après une greffe. J’aimerais aussi que les gens se posent la question de leur vivant s’ils veulent ou non être donneurs et qu’ils pensent aux personnes en liste d’attente», explique-t-il. A 7 ans, Gaëtan avait participé à son premier camp TACKERS (Transplant Adventure Camps for Kids), réunissant chaque hiver à Anzère des enfants transplantés du monde entier. L’association TACKERS l’avait ensuite sponsorisé pour participer aux Jeux mondiaux des transplantés au Canada, en 2005. Aujourd’hui, il aimerait à son tour aider des jeunes greffés en récoltant des fonds lors de son tour à vélo. Et Gaëtan de conclure : «Donner, c’est aimer.»
Gaëtan s’entraînant avec son père le long des berges du Rhône.
MaraDon au Jardin anglais
La 3e édition du MaraDon a lieu cette année le 28 juin au Jardin anglais, dès 14h. Organisé par les HUG et la Fondation ProTransplant, ce rendez-vous a pour vocation de sensibiliser le public au don d’organes. Quelque 200 patients ayant été greffés aux HUG ou au CHUV, accompagnés de proches et bénévoles, vont participer à un parcours pédestre ou cycliste.
Le départ sera donné à 15h30, avec Gaëtan en tête de cortège. «Nous voulons montrer que les personnes greffées peuvent vivre comme tout le monde. La population est invitée à nous rejoindre et à nous encourager le long du parcours», relève Nadine de Carpentry, coordinatrice de transplantation aux HUG et responsable du comité d’action de ProTransplant.
Dossier Transplantation
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Texte:
- Giuseppe Costa
Photos:
- Julien Gregorio