Directeur de la Fondation Campus Biotech Geneva depuis mars dernier, l’ingénieur et entrepreneur Nicolas Durand est aussi impliqué à la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie, à Économiesuisse et au sein d’Abionic, société qu’il a fondée il y a quatorze ans.
Pulsations : Pourriez-vous nous rappeler ce qu’est la Fondation Campus Biotech Geneva ?
Nicolas Durand : Depuis sa création en 2013 par l’École polytechnique fédérale de Lausanne et l’Université de Genève, avec le soutien de la famille Bertarelli et d’Hansjörg Wyss, la fondation a pour ambition de réunir en un même lieu des acteurs majeurs des sciences de la vie – et des neurosciences en particulier –, qu’ils soient scientifiques, cliniciens, ingénieurs ou entrepreneurs. Depuis quelques années, les HUG et la Haute école du paysage, d’ingénierie et d’architecture de Genève ont également participé à ce rassemblement de talents, qui n’est pas uniquement géographique : il repose sur l’optimisation de synergies entre les diverses équipes scientifiques et start-up présentes, dans une logique transversale allant de la recherche à la clinique. L’objectif final vise le développement de technologies inédites dans les neurosciences et les neurotechnologies.
Et ainsi de nouvelles perspectives thérapeutiques ?
Oui, et le champ des possibles est immense. Les projets menés vont ainsi de recherches spécifiques à certaines pathologies, comme la dépression ou la schizophrénie, à l’étude du sommeil, en passant par l’enregistrement en temps réel du cerveau pour mieux comprendre son fonctionnement, en temps normal, mais également en cas d’accident ou de maladie.
La fondation joue-t-elle un rôle tout au long des divers projets ?
Absolument, elle s’implique pour apporter un accompagnement global aux projets, mais également pour mettre à disposition des plateformes technologiques de pointe, comme l’unique magnétoencéphalographe de Suisse ou encore un exceptionnel système d’IRM à très haut champ magnétique (7 teslas). Il n’en existe que 200 dans le monde. De tels investissements sont indispensables, tant pour faire avancer les connaissances que pour perpétuer l’excellence scientifique et académique dont peuvent se targuer historiquement le canton de Genève et la Suisse dans son ensemble.
Pensez-vous cette situation en péril ?
Je dirais qu’une grande vigilance s’impose, car nous avons longtemps bénéficié de conditions exceptionnelles en Suisse. Le risque est de s’y complaire et de perdre un élan indissociable aux progrès. Or rester dynamique suppose parfois de sortir de sa zone de confort pour continuer à innover. La crise financière que traverse notre système de santé a amené le Conseil fédéral à envisager une réduction drastique des coûts, y compris pour la recherche, la formation et l’innovation. Le danger est que les solutions d’économie à court terme s’élaborent au détriment d’investissements essentiels pour construire la médecine de demain.
D’où votre engagement en tant que membre du Comité et du Conseil stratégique de la Chambre vaudoise de commerce et du conseil d’administration d’Économiesuisse ?
En effet, car je pars du principe que si nous voulons améliorer les conditions-cadres pour notre industrie, il faut remonter ses manches et non simplement se plaindre. Les défis budgétaires actuels sont complexes et nécessitent de s’investir pour trouver les meilleures solutions possibles.
Vous évoquiez l’importance de savoir sortir de sa zone de confort. Est-ce ce qui vous a motivé à quitter votre poste de CEO d’Abionic, société de diagnostic médical reconnue comme l’une des plus innovantes de Suisse ?
Oui, en partie. J’ai créé cette société il y a quatorze ans et j’ai tenté de l’amener le plus loin possible. Mais j’ai senti que j’atteignais mes limites, notamment pour la développer à l’étranger. Quitter la direction de cette aventure extraordinaire, même si je reste membre du conseil d’administration, n’a pas été une décision facile. Dans le même temps, l’opportunité de travailler à la Fondation Campus Biotech Geneva s’est présentée. Elle alliait tout ce qui me plaît : l’innovation, les neurotechnologies, la gestion de projets complexes et des perspectives de développement inouïes au sein de la Genève internationale.
Un mot sur votre passion, la voltige aérienne : comment est-elle entrée dans votre vie ?
Par un concours de circonstances associé au fait que j’ai toujours été fasciné par la mécanique, l’électronique et le monde de l’aviation. Aujourd’hui, je mesure ma chance de pratiquer une activité aussi exaltante et extraordinaire.
Nicolas Durand, directeur de la Fondation Campus Biotech Geneva
Texte:
- Laetitia Grimaldi
Photos:
- Nicolas Schopfer