Directrice de la Fondation genevoise pour le dépistage du cancer (FGDC), la Dre Béatrice Arzel mène désormais un combat féroce contre ce « crabe » qui touche 4’000 nouveaux patients chaque année en Suisse. Son objectif ? Faire chuter la mortalité liée à cette tumeur.
Pulsations Comment êtes-vous arrivée à la tête de la FGDC ?
Dre Béatrice Arzel Mes séjours en Afrique m’ont amenée à m’intéresser à la santé publique. J’ai alors fait un diplôme universitaire puis un master. Je suis revenue à Genève où j’ai travaillé à l’Institut de médecine sociale et préventive, et j’ai ensuite rejoint la Fondation pour le dépistage du cancer du sein (FGDCS devenue FGDC).
Pourquoi vous attaquer aujourd’hui au dépistage du cancer colorectal ?
La Confédération a émis en 2013 une ordonnance pour un remboursement des tests de dépistage de ce cancer dans le cadre de l’assurance de base. Genève a voté le financement d’un programme et mandaté la FGDC pour le mener. Pour qu’un programme de dépistage soit justifié, la maladie doit répondre à des critères précis. Sa fréquence et sa gravité sont prises en compte, tout comme l’existence de tests efficaces qui doivent conduire à une baisse de la mortalité. Le cancer colorectal répond parfaitement à ces conditions.
Qu’est-ce que ce programme va apporter de plus à la population ?
Il va permettre d’informer le public de façon claire et équilibrée. Toute la population concernée pourra se faire dépister de manière équitable et les tests seront remboursés hors franchise.
Quand sera-t-il lancé ?
En principe, dès le mois de juin. En collaboration avec les HUG et la Ligue contre le cancer, une grande journée de sensibilisation sera organisée à l’hôpital. Il y aura des conférences pour le public et une soirée d’information pour les professionnels de la santé. Le service de gastro-entérologie et les médecins de premier recours seront naturellement impliqués dans le programme.
A qui s’adresse ce dépistage organisé ?
A la population genevoise, âgée de 50 à 69 ans, car le risque augmente avec l’âge. Grâce au programme, ces personnes vont progressivement recevoir une invitation pour se faire dépister.
Quels sont les tests proposés ?
Chacun pourra choisir entre la coloscopie et la recherche de sang occulte dans les selles (FIT). Lors de la coloscopie, le gastro-entérologue introduit un tube flexible muni d’une caméra par l’anus. Il peut ainsi détecter les cancers, mais aussi les polypes – des épaississements de la muqueuse digestive que le médecin peut enlever s’il le juge nécessaire. L’examen est très complet, mais de par son caractère invasif, il n’est pas accepté par tout le monde. Le FIT est alors une bonne alternative. Cet examen, qui sera accessible en pharmacie, est capable de détecter le sang en quantité microscopique dans les selles à partir d’un échantillon fourni par le patient et envoyé au laboratoire. Les cancers et polypes de grande taille ont de fortes chances de saigner au passage des selles. La présence de sang amènera le patient à faire une coloscopie. Le FIT est excellent pour diagnostiquer un cancer et détecte également les polypes à un stade avancé, dans la mesure où il est répété tous les deux ans. La coloscopie ne se fait que tous les dix ans.
Pourquoi êtes-vous si enthousiaste de mettre au point ce programme ?
Parce qu’il permettra de faire chuter le nombre de cancers grâce à l’ablation préventive de certains polypes. En cas de cancer, le dépistage précoce d’une tumeur est souvent en mesure de diminuer la lourdeur du traitement et de changer le pronostic de la maladie. En résumé, avec ce programme, nous avons la possibilité de faire baisser la mortalité de façon drastique.
Texte:
- Esther Rich
Photos:
- Fred Merz
Les facteurs de risque
Si la prévalence du cancer colorectal augmente avec l’âge, certains facteurs peuvent toutefois accroître les risques. Le surpoids, un manque d’activité physique, une consommation excessive de viande « brûlée » (comme sur un barbecue) ou d’alcool, une nourriture pauvre en aliments complets et la présence d’une maladie inflammatoire de l’intestin peuvent avoir une incidence sur la formation de polypes et donc la survenue du cancer. Par ailleurs, si un membre de sa famille a souffert de polypes ou d’un cancer, on est plus susceptible d’en développer à son tour.