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Bouger sans peur

La prise en charge psychologique aide les patients à sortir des idées fausses et à reprendre le contrôle.

Autant que les contraintes physiques, les aspects psychologiques constituent un facteur de risque de chronicité important pour les maux de dos. Les évaluations des patients du programme ProMIDos, qui souffrent ou risquent de souffrir de lombalgies chroniques, montrent que la moitié d’entre eux présente des symptômes anxio-dépressifs (lire Reprendre le contrôle de son dos).

« Le travail du psychologue, au sein de ce programme, consiste à investiguer la personnalité du patient au travers d’un questionnaire et d’un entretien. Il s’agit de dépister d’éventuelles souffrances psychiques, de comprendre ses représentations mentales et d’explorer sa qualité de vie. Notamment sur son lieu de travail, un endroit propice à toute sorte d’enjeux psychologiques », détaille Adrien Fleury, chef de clinique au service de psychiatrie de liaison et d’intervention de crise, et psychiatre de l’équipe multidisciplinaire de ProMIDos.

Orchestre de muscles

La prise en charge psychiatrique, individuelle et groupale, s’articule sur trois axes. Le premier est l’accueil, soit la reconnaissance et la validation de la plainte douloureuse. Au cours d’une seconde étape, il s’agit d’aider le patient à s’affranchir la conception dite «lésionnelle» de sa pathologie. En effet, la plupart des gens s’imagine le mal de dos comme la conséquence d’un problème strictement mécanique, comme si une pièce du corps avait cassé. Or, la grande majorité des lombalgies ne montrent aucune lésion significative sur un scanner ou une IRM, car elles découlent d’un désordre musculo-squelettique (lire Les maux de dos se soignent... en bougeant).

De fait, le dos peut être comparé à un orchestre. Il est composé d’une centaine de muscles. Pour bien fonctionner, ces derniers doivent tous travailler en harmonie. Dans le cas contraire, il en résulte une cacophonie qui se traduit physiquement par une douleur.

Confiance en l’avenir

Enfin, le troisième axe de la thérapie consiste à investiguer le vécu douloureux du patient. « Le ressenti corporel fige la pensée. Les patients perdent confiance en l’avenir. Du coup, la douleur occupe la place et s’installe. Pour sortir de cet état, nous questionnons l’expérience de la souffrance et explorons l’événement déclencheur: quand est-il survenu? Comment? Avec quel contenu émotionnel? », explique le psychiatre.

Un traumatisme réitéré, une forte douleur pendant une promenade ou à l’occasion d’un mouvement particulier, peut générer à la longue une angoisse d’anticipation: la peur de bouger. Dans le jargon médical, on parle de kinésiophobie. « En rééclairant le passé du patient, ce dernier peut regagner du pouvoir ou du contrôle sur ce qui lui arrive. Il peut à nouveau se projeter mentalement dans l’action. Or, une part essentielle du traitement des lombalgies consiste justement à se mobiliser et à bouger », souligne le Dr Adrien Fleury.

  La prise en charge psychiatrique est à la fois individuelle et groupale.

Retour au travail

Après un problème de dos, le retour au travail peut s’avérer délicat en raison de séquelles. Le patient doit suivre alors une réhabilitation spécifique dite « à visée professionnelle ». Aux HUG, cette phase de réinsertion est conduite de bout en bout par les ergothérapeutes spécialisés. « Nous procédons à une analyse globale de la situation: conditions de travail, mode de vie, moyens de transport. Puis, nous proposons des solutions adaptées à chaque cas », rappelle Amandine Durand, du service d’ergothérapie préprofessionnelle. Un versant important de sa mission consiste aussi à nouer un dialogue avec l’employeur afin de le rassurer sur les compétences de son collaborateur. « Si le patient en a les capacités, notre objectif est qu’il puisse garder son emploi », souligne-t-elle. Quand la réinsertion professionnelle n’est plus possible, l’ergothérapeute règle les questions liées aux assurances et réalise les démarches auprès de l’assurance invalidité.

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