En cas de maladies graves et évolutives, des soins spécialisés sont mis en place pour soulager la personne malade et son entourage. Objectif: préserver la meilleure qualité de vie possible.
Soins palliatifs. Deux mots qui font peur et… sont trop souvent mal compris. D’emblée, le Dr Gilbert Zulian, médecin-chef du service de médecine palliative, tord le cou à une idée fausse: « Ils ne doivent pas faire penser à la mort, mais à la vie. » Et de se référer à la définition de l’Organisation mondiale de la santé: « Les soins palliatifs cherchent à améliorer la qualité de vie des patients et de leur famille, face aux conséquences d’une maladie potentiellement mortelle, par la prévention et le soulagement de la souffrance. » Les HUG ont une longue tradition dans ce domaine puisqu’au début des années 80, sous l’impulsion du Pr Charles-Henri Rapin, une unité spécifique s’ouvrait au Centre de soins continus. Plus récemment, en 2007, un service de médecine palliative, doté de 32 lits, était créé.
Soins complexes
Les personnes hospitalisées dans ce service sont généralement âgées. Dans 80% des cas, elles sont atteintes d’un cancer accompagné d’un affaiblissement général et de divers problèmes comme une insuffisance rénale ou des difficultés respiratoires. Les autres cas concernent des atteintes neurologiques ou de graves problèmes cardiorespiratoires. « Ce sont toujours des soins complexes où chaque symptôme justifie une démarche diagnostique précise », résume le Dr Zulian.
Quels symptômes ? Cela va notamment de la douleur à l’essoufflement en passant par les nausées, la somnolence, la fatigue ou encore le manque d’appétit. Sans oublier l’anxiété ou la déprime. « Tous produisent un certain degré de souffrance qu’il faut précisément évaluer pour soulager au mieux. L’objectif de soins demeure toujours la personne et pas la maladie. Les situations, génératrices d’angoisse, sont abordées dans un discours de vérité », relève le Dr Zulian. L’écoute et l’accompagnement de la famille et des proches font également partie intégrante de la prise en charge (lire Les proches au cœur des soins). Aux côtés des médecins et infirmiers, ces soins sont prodigués, selon les besoins, par un psychologue, un psychiatre, un sophrologue, un hypnologue, un art-thérapeute ainsi que physiothérapeutes et ergothérapeutes. « Sans oublier l’oreille attentive des bénévoles, les informations intimes recueillies par les femmes de ménage et, pour ceux qui le souhaitent, les soins spirituels proposés par les aumôniers. Nous abordons chaque situation dans une approche multidisciplinaire », explique le médecin-chef de service.
Label qualité
A l’extérieur du service, les équipes mobiles réunissant médecins et infirmières sur tous les sites de soins des HUG poursuivent les mêmes buts. Elles interviennent en deuxième ligne, c’est-à-dire en soutien aux équipes qui sont en contact direct avec les patients (lire Au chevet des patients). Le programme de soins palliatifs des HUG s’étend également au domicile, dans les établissements médico-sociaux ou dans toute autre institution avec l’intervention de l’unité de soins palliatifs communautaire (lire Etre soigné chez soi). D’ailleurs, répondant aux critères d’évaluation fixés par la Société suisse de médecine et de soins palliatifs, toutes les prestations des HUG ont obtenu, fin 2012, le label Qualité dans les soins palliatifs. « Cette distinction est une reconnaissance de l’expertise professionnelle et des qualités humaines des équipes impliquées », se félicite le Dr Zulian. Parallèlement aux soins, les missions d’enseignement et de recherche ne sont pas délaissées. Dans le cursus prégradué des études de médecine, en plus des heures de cours, une journée d’immersion est désormais au programme, ainsi que des cours et stages à option. « La place accordée aux soins palliatifs dans les études devrait ancrer cette dimension dans le développement mental des futurs médecins », espère le Dr Zulian.
Discipline médicale à part entière
Les thèses de doctorat comme les thèmes de recherche médicale et infirmière ne manquent pas. « Les sujets choisis, par exemple l’apport d’antibiotiques dans les deux dernières semaines de vie, révèlent que cette discipline médicale existe à part entière et qu’un malade en soins palliatifs a autant de valeur qu’un malade en soins curatifs », remarque celui qui se définit comme un « palliativiste », à savoir à la fois un interniste, un gériatre et un oncologue. Et de conclure par un dernier message: « Les soins palliatifs, c’est donner du temps à ceux qui n’en ont plus.»
Ecoute attentive au quotidien.
32
lits disponibles au service de médecine palliative
Sensibiliser tous les professionnels
Le Conseil d’Etat a inscrit comme objectif de législature 2010-2013 un programme cantonal de développement des soins palliatifs. Pourquoi ? Pour répondre au défi du vieillissement de la population en garantissant les soins aux personnes âgées et à l’augmentation des maladies chroniques. Outre la création d’une équipe mobile au sein du dispositif cantonal (lire Etre soigné chez soi), il recommande une formation de type sensibilisation à tous les professionnels concernés des HUG et de l’institution genevoise de maintien à domicile (imad), soit respectivement 5200 et 800 collaborateurs.
« Les objectifs de cette formation sont de faire connaître le concept des soins palliatifs, ainsi que les symptômes et les principaux outils d’évaluation, d’identifier les patients, d’utiliser les ressources du réseau genevois (documents de référence, sites Internet). Autre but: mettre l’accent sur les directives anticipées et le représentant thérapeutique », résume la Dre Sophie Pautex, médecin adjointe agrégée, responsable de l’unité de soins palliatifs communautaires, qui a supervisé le programme de formation.
Aux HUG, celle-ci est disponible depuis février 2014 sous la forme d’un cours en ligne (e-learning). Elle s’adresse non seulement au personnel soignant, mais aussi aux nouveaux médecins. A l’imad, elle est donnée depuis septembre 2013 sur trois heures à des groupes d’une vingtaine de personnes. L’organisation et le suivi de cette action d’envergure sont assurés par le centre de formation des HUG.
Maison de Tara, pionnier à Genève
La Maison de Tara, ouverte fin 2011, offre aux personnes en fin de vie un séjour de quelques jours ou de quelques mois dans un lieu accueillant et calme. Structure privée, inédite à Genève, elle est destinée à ceux qui sont trop seuls dans ces moments difficiles. Elle offre un accompagnement jour et nuit, assuré par un personnel bénévole et formé.
Située sur la commune de Chêne-Bougerie, cette maison dispose de quatre à cinq places. Tout patient en fin de vie, mais dont l’état de santé autorise une prise en charge à domicile peut y être admis. Les résidents gardent leur médecin traitant et leur aide pour les soins à domicile, tout comme ils le feraient s’ils habitaient encore chez eux.
Les visites sont autorisées en tout temps. Les chambres sont dotées d’un lit d’appoint pour les proches. Les animaux de compagnie sont également admis « pour autant qu’ils aient été dressés, vermifugés et socialisés », précise le site Internet de la Maison de Tara.
Dossier soins palliatifs
- Donner de la qualité au temps qui reste
- Au chevet des patients
- Etre soigné chez soi
- Projets de vie aux soins palliatifs
- Les proches au cœur des soins
Texte:
- Giuseppe Costa - André Koller
Photos:
- Pulsations